L’histoire

Six siècles d’histoire ancrés dans nos terres

Depuis six siècles, des vignerons se succèdent sur la terre de Cheval Blanc, qui s’inscrit elle-même dans une civilisation de la vigne vieille de 2 000 ans. La configuration actuelle du domaine remonte au milieu du XIXème siècle. En plus de 150 ans, les rênes de Cheval Blanc n’ont changé de mains qu’à une seule reprise, permettant au Château d’inscrire sa gestion technique dans la permanence, et de sauvegarder l’intégrité de son capital végétal.

Si l’emplacement et l’époque exacte des premières vignes cultivées dans le Bordelais restent incertaines, nous savons que dès l’époque romaine, de riches villas viticoles s’élevaient sur les terres de Saint-Emilion, à l’image de celle d’Ausone, poète-vigneron et consul sous l’Empire romain au IVe siècle. Le développement de ce vignoble s’est poursuivi au fil des siècles, jusqu’à s’intensifier au Moyen-Âge. Au XIIe siècle, sous l’occupation anglaise, la création et le développement du port de Libourne ouvrent la voie aux expéditions maritimes qui permettent de porter la renommée de ces vins à travers l’Europe. Saint-Emilion produit alors des vins dits « honorifiques », offerts aux personnalités les plus prestigieuses comme aux souverains, déjà considérés comme d’une qualité et d’un potentiel de garde rares.

Toutefois, Cheval Blanc jouit d’un terroir unique, où graves et argiles cohabitent à proportion à peu près égale. Un pur hasard pourtant fondamental dans son histoire.

L’histoire de Saint-Emilion, poétiquement dépeinte comme la « colline aux mille châteaux » est peuplée d’amateurs éclairés et de spécialistes passionnés qui ont tous participé à forger la renommée séculaire du vignoble.

Au confluent de l’Isle et de la Dordogne, le territoire de l’appellation d’origine contrôlée « Saint-Emilion » se situe à l’est de Libourne, autour de la cité de Saint-Emilion sise sur un plateau calcaire. Château Cheval Blanc occupe une position particulière dans l’appellation. Car si la plupart des autres crus réputés de Saint-Emilion sont localisés sur les formations calcaires datant du Tertiaire, Cheval Blanc se situe sur les alluvions Quaternaires de l’Isle. Il partage cette formation, non calcaire et de texture variée, avec la plupart des crus prestigieux de Pomerol.

Dès le XVe siècle, d’anciens textes témoignent de l’existence de vignes cultivées à Cheval Blanc. Des archives datées de 1546 révèlent que la propriétaire de ces terres cède ces vignes en fermage, et un contrat de 1587 stipule que le métayer « y demeurera à coucher la nuit pour garder les fruits vendangés de ladite vigne… ». Un siècle plus tard, la métairie baptisée « Au Cheval-Blanc » est vendue par Bertrand de Gombaud pour l’importante somme de 1 400 livres. À l’aube de la révolution française, deux vignerons résident en permanence à Cheval Blanc, fait exceptionnel qui témoigne de la qualité du terroir.

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Le renouveau

La carrière prestigieuse de Cheval Blanc débute en 1832 par l’achat du cœur du domaine par Jean-Jacques Ducasse, président du tribunal de Libourne. Durant les vingt années suivantes, l’achat successif de parcelles provenant du Château Figeac permettra la constitution du domaine de Cheval Blanc dont le parcellaire de 39 hectares est pratiquement identique depuis lors.

Surtout, l’union d’Henriette Ducasse, fille du propriétaire, avec Jean Laussac-Fourcaud, négociant en vins à Libourne, va marquer un nouveau tournant dans la destinée de Cheval Blanc et définir l’identité si unique de ce cru. Lorsque Cheval Blanc revient à Henriette, son époux entreprend une modernisation spectaculaire du domaine ; étant le premier à comprendre l’importance de la contrainte hydrique pour produire de plus beaux vins, il imagine notamment sur certaines parcelles la création d’un efficace réseau de drains muraillés et couverts.

Mais l’œuvre la plus marquante du nouveau maître des lieux concerne les vignes : décelant en Cheval Blanc un terroir d’exception, et guidé par une intuition extraordinaire, Jean Laussac-Fourcaud replante au milieu des années 1860 une partie de la propriété et opte pour un encépagement singulier, fait pour moitié de Merlot, cépage-roi de la Rive Droite, et pour moitié de Cabernet Franc. Un choix totalement atypique, dont la mise en œuvre sera achevée en 1871. Enfin, dès 1852, l’ancien « vin de Figeac » est commercialisé pour la première fois sous le nom de Cheval Blanc. Sa carrière prestigieuse débute alors.

La notoriété

Pendant plus de trente ans, Jean Laussac-Fourcaud va se consacrer à cet unique objectif : porter son vin jusqu’aux sommets de la viticulture saint-émilionnaise et asseoir sa notoriété naissante. En 1862, Cheval Blanc obtient sa première médaille à l’Exposition universelle de Londres ; la représentation de cette médaille de bronze orne toujours les étiquettes de Cheval Blanc. En 1878, le Château gagne sa première médaille d’or à l’Exposition universelle de Paris ; cette nouvelle récompense figure elle aussi, depuis, sur la robe des flacons. En 1886, Cheval Blanc décroche sa seconde médaille d’or à l’Exposition universelle d’Anvers.

La construction du Château au cœur du domaine de Cheval Blanc couronne cette démarche. La voie de la reconnaissance internationale est désormais grande ouverte. Les années 1880 voient ainsi se concrétiser les plus grands rêves de Cheval Blanc. Désormais considéré comme l’égal des premiers grands crus du Médoc et comme l’un des vins les plus réguliers au monde aussi bien par les négociants que par les amateurs dès la seconde moitié du XIXème siècle, il côtoie Margaux, Latour, Lafite et Haut-Brion dans les ventes aux enchères parisiennes et londoniennes. Sa notoriété lui permet de figurer sur la carte des plus prestigieux repas officiels : il devient incontournable lors des grandes réceptions et des dîners présidentiels.

Au décès de Jean Laussac-Fourcaud, en 1888, sa veuve hérite du domaine ; elle le lègue à son fils Albert, qui inverse l’ordre de son nom de famille. Albert Fourcaud-Laussac perpétue l’œuvre de son père et fait installer douze cuves en bois qui seront utilisées jusqu’en 1966 ; la richesse unique du patrimoine végétal, qui fait l’objet de sélections internes au domaine, mobilise déjà d’importants moyens financiers et humains. Jacques et Joseph, fils d’Albert Fourcaud-Laussac, poursuivront la politique d’excellence mise en œuvre par leur père et leur grand-père. Durant 44 ans, un même maître de chai veillera chaque jour sur Cheval Blanc : Gaston Vaissière mettra ainsi son talent, son énergie et sa passion au service d’un terroir qu’il considère comme « magique » …

Le passage de flambeau intervient à l’automne 1998. Deux amis de longue date, amoureux des grands vins, s’associent afin d’acquérir ce joyau de Saint-Emilion : Bernard Arnault et le baron Albert Frère deviennent propriétaires du prestigieux Château et lui insufflent une vitalité nouvelle, dans le respect de son histoire comme de son patrimoine, et dans une confiance totale aux équipes en place.

La consécration

En 1954, lors de la première classification des vins de Saint-Emilion, Cheval Blanc obtient la distinction suprême : le classement de Premier Grand Cru Classé « A ». Cette distinction a été confirmée, depuis, à chaque décennie : l’excellence est maintenue de classement en classement. Cheval Blanc pénètre dans le prestigieux et convoité « Club des 9 », lequel réunit les premiers parmi les premiers de Bordeaux.

La quête d’une qualité parfaite s’inscrit aujourd’hui dans une démarche permanente alliant culture du détail et recherche de précision. Cette dynamique qui porte Cheval Blanc se veut résolument tournée vers l’avenir. Témoin de cette volonté, le chai imaginé par Christian de Portzamparc se dresse depuis juin 2011 dans le prolongement du château. Fidèle aux souhaits du baron Albert Frère et de Bernard Arnault, ce bâtiment préfigure l’avenir tout en s’intégrant dans un paysage historique classé au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Les dernières décennies s’inscrivent dans une trajectoire toujours aussi dynamique, avec la naissance d’un grand bordeaux blanc : Petit Cheval blanc. Cette aventure débute en 2006 par le rachat du Château La Tour du Pin, un grand cru planté en Merlot et en Cabernet franc. Dès 2008 interviennent les premiers essais de surgreffages en Sauvignon blanc visant à déterminer les potentialités viticoles des sols. Quelques années plus tard, le Sémillon fait son apparition au sein d’un vignoble déjà en production. Ainsi en septembre 2016, Château Cheval Blanc présente non sans fierté Petit Cheval blanc 2014.

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L’environnement privilégié du domaine de La Tour du Pin voit bientôt se bâtir un sanctuaire entièrement dédié à la nature. Rapidement, cette vision va s’étendre, se développer et s’accélérer : en 2021, Château Cheval Blanc publie un Manifeste détaillant son engagement dans la voie de l’agroforesterie. Désormais, dans le domaine, la viticulture côtoie l’élevage, le maraîchage, les potagers, les vergers, les jardins de fleurs et les ruches. Cette agriculture de préservation s’enracine sur des sols vivants, couverts, exempts de labour. La polyculture et la biodiversité reviennent au cœur du domaine.

En juillet 2021, Château Cheval Blanc prend la difficile décision de se retirer du classement de Premier Grand Cru Classé « A ». Une décision mûrement réfléchie, motivée par un constat : la grille d’évaluation et les critères de classement s’avèrent désormais trop éloignés des fondamentaux du domaine. Le terroir, le vin et son histoire doivent demeurer, aujourd’hui comme demain, au cœur des attentions et des préoccupations de Château Cheval Blanc.